01/02/2015, Théâtre de Boulogne
LA DANSE DU DIABLE (source)
PROLOGUE
Il était une fois, dans un pays que vous ne connaissez pas, une ville immense, grise et froide. Un jour, sur les murs de cette ville, apparut une affiche. Elle annonçait un spectacle de théâtre : La Danse du Diable, histoire comique et fantastique. Poussé par la curiosité, on se rua. Un autobus avait été prévu, on s’y entassa gaiement. On mangeait du fromage. Hélas, au bout de quelques heures, l’autobus s’arrêta. C’était la panne. “ De qui se moque-t-on ? ” entendait-on. “ C’est un scandale ! ” Autour, rien. La campagne noire. Alors, on se mit en route, à pied. Très vite, l’enfer commença : pluie, neige, vent. Pendant quelques jours on put encore trouver du ravitaillement, et puis la famine s’abattit sur la petite troupe des spectateurs. On tira z’à la courte paille. Le sort, bien sûr, tomba sur le plus gros. C’était un homme adorable. Il sut mourir sans faire d’histoire. On traversait des torrents glacés, sur des rochers qui glissaient et les eaux emportaient le corps d’une grande et belle femme, entortillée dans son manteau avec son sac. Ô grand lys blanc, tu disparus dans le bouillon ! Mais on continuait. Pourquoi continuait-on ? Etait-on poussé par l’amour du théâtre, un amour devenu frénésie ? Etait-ce la peur de se perdre, d’être abandonné par les autres en route ? Je ne le crois pas. Je crois que c’était plutôt la volonté de se plaindre. Se plaindre au responsable d’une telle affaire. Aussi, quelle ne fut pas la surprise et la déception de la petite bande de survivants, qui, pénétrant péniblement dans cette bâtisse sordide, ne virent sur la scène qu’un banc et qu’un chiffon !
(Il se rue vers le public).
La Danse du Diable ! Histoire comique et fantastique ! Tout de même ! On ne nous aura pas fait vivre ce cauchemar, gravir ce golgotha pour ne voir que cela : un banc, un chiffon, et sur la scène un fou qui dit n’importe quoi ! Qui dit n’importe quoi parce qu’il ne veut pas commencer son spectacle. Parce qu’il a peur de commencer son spectacle. Ah oui, mais pourquoi fou, ce fou ? Pourquoi ? Je vous le demande à vous, monsieur, qui m’observez les yeux brillants de fièvre et d’épouvante. Je vous le demande à vous qu’on a grugés, vous qui vous entassez frileusement les uns contre les autres, grotesquement juchés sur ces bancs inconfortables. À cause de qui ? À cause d’une femme. À cause des femmes. Parce que c’est toujours la faute des femmes. Et, moi, Ferdinand Faure, je le prouverai !…
MUSIQUE : Le Mystère des voix bulgares
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